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UN POÈTE CHEZ LES ÉLEVEURS DE PICKUPS

de Michel X Côté (Éditions du Quartz, septembre 2023)

Une chronique de Serge Durand

La collection Brûlot se présente comme étant un terrain de jeu pour les tannants et les tannantes, les infréquentables, celles et ceux qui refusent de se taire. Le « Brûlot » pique parfois un peu, cherche à nous faire sourciller, à nous traverser, à nous transformer, comme devrait le faire la littérature: en aidant le vivant à se déployer.

Qui de mieux pour représenter cet esprit brulant du verbe que celui qui est définit ainsi par l’éditeur : Poète, Michel X Côté, n’en revient pas encore d’être né à Rouyn-Noranda en 1948. Il écrit et dessine comme un fou soigne ses maladresses. Il ne croit pas avoir été nuisible.

Mais qui sait ?

Puis-je vous rappeler que c’est lui qui a écrit avec son ami d’enfance Richard Desjardins une chanson inscrite à jamais dans notre patrimoine et chair collective : Le coeur est un oiseau ?

J’entends encore ce chant mémorable de Lou Babin accompagnant la mort de Boyer dans le film « Le Party » de Pierre Falardeau, celui que personne n’a réussi à faire taire. Tout se tient.

« Ni argent, ni gloriole, ni pouvoir sur qui ou quoi que ce soit, sans salaire, sans recension et sans la timide adulation de quelques âmes perdues, juste pour le plaisir, à peine remarquable, d’écrire encore. – Michel X Côté, page d’introduction au recueil.

J’aime ce vieux mot: recueillir, qui vient du latin recoligere, qui signifie rassembler.

Récupérer en un tout lisible des pensées 360 degrés vécues sur ces par-chemins de bois fréquenté par son pickup. Avoir quelque chose à dire. Le dire vraiment. Sans crier gare, vous êtes prévenu(e)s !

« Dans les publicités, on ne voit jamais les pickups grimper des montagnes d’ossements broyés, sortir indemnes des flots de lave des volcans et s’ébrouer comme les chiens contre l’indifférence d’un ciel méchant. On y parle à tue-tête de mondes naissants alors que, bien sûr, il y a de plus en plus de maisons sans livres.  » – p.18

Ce livre est poésie tout au long de ses 54 pages. Des mots tout-terrain maniés par un poète qui a l’expérience de « shifter » au bon moment pour surprendre tes sens et faire jaillir l’émotion qui fait comprendre. J’accompagne ma lecture avec la musique de John Fahey, fondateur de « L’American Primitive Guitar ». Un blues à l’apparence minimaliste, rude et sincère qui accompagne les effluves des sous-bois de la terre adorée du poète et les odeurs de la mort de la Fonderie Horne. Blind Joe Death.

« Comment savoir ce que nous désirons si l’aube nous est refusée. » – p.36

« Quelque part en Abitibi, sur un à pic rocheux d’à peine trois mètres, l’ocre rouge veille sur le silence des mondes. Il se peut que nous arrivions à comprendre ce qui brûle quand une forêt est en feu » – p.54

Ce petit livre, j’en ferai provision pour le donner aux gens que j’aime. Sa lecture fait du bien à ma raison qui doit affronter son réalisme vivifiant en territoire bien souvent inexploré.

« Devant tant de catastrophes annoncées à toute heure du jour , les enfants à naître restent sans pouvoir » – p.51

Serge Durand

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