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L’orangeraie

de Larry Tremblay et Pierre Lecrenier (Éditions Rue de Sèvres, 2025)

Une chronique de Serge Durand

J’aime le roman graphique. Ce chaînon manquant entre le roman et la BD. Il fait son petit bonhomme de chemin depuis les années 60 et connaît une popularité grandissante depuis 2010. Lorsque la rencontre de la plume et du pinceau est réussie, cela crée un objet littéraire à part entière empreint de connu et d’inconnu. Je pense au chef-d’œuvre graphique et orchestral de Rebecca Dautremer pour le roman Soie d’Alessandro Barrico. À mon premier coup de cœur en 1992, Le bar du vieux Français de Staasen/Lapière. Un récit intimiste, inexistant alors en BD traditionnel, pour chanter un hymne aux déshérités de la terre.

Une des grandes vertus du roman graphique est de faciliter au lecteur la compréhension d’histoires complexes et douloureuses. Le maillage des mots et des images deviennent autant de clés pour décoder réalités, émotions et vérités.

Un bien grand détour! Vous avez déjà deviné que j’ai complètement craqué pour L’orangeraie. Je l’ai lu très lentement. J’ai pris tout mon temps. C’est la nécessité bienheureuse de regarder attentivement les images et leurs évocations de la joie et de la douleur. Tout est intimement lié. Quelque soit le style emprunté, la réussite d’un roman graphique est sa fluidité. L’orangeraie est organique. Je n’ai pas lu ce troisième roman de Larry Tremblay. La sensation que je vis est que tous les mots ont été choisis minutieusement comme le musicien joue ses notes en sachant que seul le silence magnifie son jeu. C’est une histoire agreste de joies simples ravagée par le fanatisme religieux et la guerre.

Il y a beaucoup de moments où l’on dépose ce livre comme celui où la mère supplie son dieu de ne pas lui prendre ses deux fils. La magie de l’intimité et du sensible vous fait fermer les yeux. C’est aussi ça la réussite de L’orangeraie. Les séquences longues d’images sans mot qui ralentissent le tempo et obligent le lecteur à la réflexion. Je l’ai rangé tout à côté de Le bar du vieux Français pour que les deux se réchauffent d’un même humanisme empreint de lumière. Ce début du vingt-et-unième siècle est désespérant, tapissé mur à mur de bêtises et de crimes contre les humains et notre mère la Terre. La conclusion de L’orangeraie résonne encore plus fort de vérité à celles et ceux qui veulent l’écouter.

Je te parle avec
De la paix dans ma bouche

Je te parle avec
De la paix dans mes mots
dans mes phrases

Je te parle avec une voix
Qui a sept ans, neuf ans
Vingt ans, mille ans

L’entends-tu ?

L’orangeraie de Larry Tremblay et Pierre Lecrenier (Éditions Rue de Sèvres, 2025)

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