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L’amour dévorant selon Véronique Grenier

9782923553900
Hiroshimoi | Éditions : Ta Mère

L’amour comme un cri étouffant

hiroshimoi« Tu me tues, tu me fais du bien. » Cette phrase de Marguerite Duras, tirée de Hiroshima, mon amour, mérite absolument sa place en exergue du roman Hiroshimoi de Véronique Grenier, paru aux excellentes éditions de Ta Mère.

En effet, ce court roman sous forme de fragments expose la valse malsaine entre l’espoir et la déception que vit une femme dans sa relation plus qu’ambigüe avec un homme qui n’est célibataire que lorsqu’il le veut bien. Malgré les illusions que subit cette femme, l’auteure arrive à capturer, en un clin d’œil, des moments touchants et des bonheurs tout simples qui pourraient sembler banals sous une autre plume. On suit ce couple clandestin dans son intimité, au restaurant, dans la chambre à coucher, mais ce sont surtout les pensées qui tourmentent la narratrice en l’absence de son amant qui révèlent la profondeur de ce roman. L’auteure arrive à transmettre parfaitement les sentiments tantôt d’extase, tantôt de déchirement que provoquent la manipulation et le mensonge de la part de l’être aimé.

Un style poétique bien maîtrisé parvient à soutenir la charge émotive de ce récit hachuré, lacéré comme une proie sous les griffes d’un prédateur. Puisque ce roman est particulièrement court (65 pages dont certaines ne comptent qu’une brève phrase), on pourrait reprocher à l’auteure de ne pas nous en avoir donné assez. Cependant, vu sa qualité et sa profondeur, on pourrait plutôt choisir de lire ce roman comme on lit de la poésie, en méditant et en savourant chaque phrase, chaque fragment. D’ailleurs, plusieurs passages frappent fort et méritent qu’on s’y attarde :

« Cette fois où je t’ai fait de la place dans mes tiroirs et qu’ils sont restés vides. »

« Je t’ai laissé me poser une poignée dans le dos. Mais t’étais habitué, j’tais pas la première à qui t’en vissais une. J’pense que t’as percé mes poumons avec ta drill. Tu me traînes au bout de tes bras qui vont toucher le sol. Je sais pas si tu vois mes jambes écorchées, la trace de sang qui marque ton chemin. Je me vide. »

Véronique Grenier, qui est aussi professeure de philosophie et chroniqueuse pour Urbania, est certainement une auteure à lire et à suivre et on ne peut que se réjouir d’avoir entre les mains un premier roman aussi puissant.

Stéphanie R.

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