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Les sept morts d’Evelyn Hardcastle de Stuart Turton


9782355847264

Turton, Stuart
Éditions Sonatine
38,95$

Un whodunit façon Jour de la marmotte

En ce mois d’octobre, avec l’automne qui s’installe et Halloween à nos portes dans quelques semaines, quoi de mieux qu’un bon roman à énigmes à la Agatha Christie, mais réinventé avec une touche moderne. C’est ce que nous offre le britannique Stuart Turton avec Les sept morts d’Evelyn Hardcastle, un délicieux whodunit façon Jour de la marmotte. Dans ce roman, le protagoniste, un homme au passé mystérieux du nom d’Aiden Bishop, est condamné à revivre sans cesse la même journée, selon un cycle de huit jours, habitant les traits d’un personnage différent chaque jour. Cette journée se solde immanquablement par le meurtre d’Evelyn Hardcastle, chaque soir. Afin d’échapper à ce cycle maudit, il doit résoudre ce crime. S’il ne réussit pas dans les huit jours qui lui sont alloués, sa mémoire sera effacée et il devra reprendre son enquête du début.

Comme dans tout bon roman à énigmes, l’intrigue se déroule dans un lugubre manoir anglais, isolé au milieu d’une dense forêt, Blackheath House. Le tout sous un ciel perpétuellement pluvieux et menaçant. Les maîtres des lieux, Lord Peter et Lady Helena Hardcastle, y ont invité plusieurs notables pour un long weekend à l’occasion d’un grand bal masqué qu’ils organisent pour célébrer le retour de leur fille aînée, Evelyn, après un très long séjour en France. L’invitation à cette fête, accompagnée d’une liste des invités, ouvre d’ailleurs le roman, avec une mention demandant à ces derniers de ne pas mentionner les tragiques événements passés. Le ton est ainsi donné dès le départ.

C’est sous les traits de certains de ces invités de Blackheath qu’Aiden devra résoudre le meurtre d’Evelyn. Bien entendu, la plupart des distingués invités, tout comme leurs hôtes, cachent de nombreux secrets qu’Aiden devra mettre au jour afin de connaître leurs motivations profondes et d’espérer démasquer le tueur. Dans sa quête, il sera aidé par une mystérieuse Anna ainsi que par Daniel, un autre invité des Hardcastle, le tout sous les directives d’un inquiétant maître du jeu revêtant de sombres habits et un masque de médecin de peste. À qui peut-il vraiment faire confiance dans ces circonstances? Sans compter cet horrible valet de pied psychopathe, qui rode et n’attend qu’un moment de vulnérabilité pour attaquer. Intriguant, n’est-ce pas?

Une des dimensions les plus intéressantes de ce roman est qu’Aiden doit accomplir sa mission en habitant l’enveloppe corporelle et psychique de huit hôtes différents, chacun comportant ses avantages et ses limitations. Non seulement doit-il composer avec les limitations physiques de certains personnages, mais son jugement et ses actions sont également affectés par leur personnalité. Dans la peau de l’un, il est lâche et peureux. Dans la peau d’un autre, il est vif d’esprit et vaniteux, mais coincé dans un corps obèse qui peine à se mouvoir. La nature de chacun de ses huit hôtes corporels vient donc teinter son jugement et influencer le déroulement de son enquête. De plus, l’auteur joue brillamment avec les codes du roman à énigmes à l’anglaise, les remaniant avec intelligence pour les amener dans la modernité. Tous les éléments classiques du genre sont présents, que ce soit au plan du décor, avec ce vieux manoir de campagne anglais décrépi, ou encore au niveau des personnages, délicieusement typés, sans toutefois être caricaturaux. Les changements de perspectives et les sauts dans le temps lors de cette journée sans cesse répétée viennent aussi ajouter une touche de fraîcheur au récit, ce qui vient enrichir notre expérience en tant que lecteur. Comme il est mentionné en quatrième de couverture, Turton nous offre un réel plaisir de lecture avec cet habile premier roman très rythmé, offrant au lecteur de multiples rebondissements au détour de chaque page ou presque.

Il faut également souligner la beauté de ce livre en tant qu’objet physique. Les jolies illustrations présentées en vignettes numérotées sur la couverture ainsi que le plan du manoir et du domaine ne sont pas sans rappeler le jeu de société populaire Clue et ajoutent au charme vintage du roman.

Bonne lecture!

Josée Laberge

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